Décentralisation au Gabon : Enjeux, défis et opportunités pour les collectivités locales

Présentation de l’expert

André BIAYOUMOU  est expert certifié en stratégie financière des collectivités locales, diplômé d’un Master en Économie du développement, spécialisé en Conception et Ingénierie de projets de développement à l’Université de Bordeaux en France.

Après des études secondaires effectuées au Gabon, son pays de naissance, André BIAYOUMOU est devenu un fervent défenseur du développement des pays du Sud, en particulier des régions rurales souvent marginalisées. Selon lui, « le développement économique durable d’un pays passe inéluctablement par la croissance et le développement équilibré de ses collectivités locales

Nouveau cadre constitutionnel : une avancée majeure pour les collectivités locales au Gabon

Le 16 novembre 2024, la République Gabonaise a adopté une nouvelle Constitution, ouvrant une ère sans précédent pour les collectivités locales. Sept articles majeurs encadrent désormais clairement les prérogatives et les compétences des élus locaux :

  • Article 155 : « L’État assure la gouvernance des collectivités locales par une politique de décentralisation efficace et efficiente, garante d’un développement local équitable, démocratique et inclusif. »

  • Article 156 : « Les Collectivités locales sont des personnes morales de droit public créées par la loi qui exercent leurs activités sur le territoire national, notamment les communes et les départements. Elles peuvent être modifiées ou supprimées après avis des conseils intéressés et dans les conditions fixées par la loi. »

  • Article 157 : « Les Collectivités locales s’administrent librement par les Conseils élus dans les conditions prévues par la loi, notamment en ce qui concerne leurs compétences et leurs ressources. Dans la mise en œuvre de la décentralisation, tout transfert de compétences entre l’État et les Collectivités locales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des Collectivités locales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les Collectivités locales. »

  • Article 158 : « Les Collectivités locales ont vocation à prendre des décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon. »

  • Article 159 : « Pour le développement des Collectivités locales, l’État met à leur disposition une dotation spéciale annuelle inscrite dans la loi de finances. »

  • Article 160 : « Des consultations locales portant sur des problèmes spécifiques ne relevant pas du domaine de la loi peuvent être organisées à l’initiative, soit des Conseils élus, soit des citoyens intéressés, dans les conditions fixées par la loi. »

  • Article 161 : « Les conflits de compétences, entre les Collectivités locales d’une part, ou entre une Collectivité locale et l’État d’autre part, sont portés devant les juridictions administratives, à la diligence des autorités responsables ou du représentant de l’État. Le représentant de l’État veille au respect des intérêts nationaux et des lois, et assure le contrôle de tutelle. Une loi organique précise les modalités d’application du présent titre.

l’expert Gabonais,  André BIAYOUMOU

Comprendre la décentralisation : enjeux et perspectives concrètes

Compte tenu de l’importance des prérogatives transférées aux collectivités locales, il est crucial de bien saisir la notion de décentralisation.

La décentralisation territoriale consiste à confier certaines attributions publiques à des collectivités locales qui bénéficient d’une réelle autonomie de gestion. Bien qu’autonomes, ces collectivités restent soumises au contrôle de légalité exercé par le représentant de l’État, qui n'agit pas comme supérieur hiérarchique, mais vérifie uniquement la conformité juridique des actes pris localement. C’est le principe de libre administration des collectivités locales.

En parallèle, il existe la décentralisation technique ou fonctionnelle, concernant des institutions spécialisées, compétentes uniquement pour gérer certains services publics spécifiques (comme les établissements publics). Cette forme de décentralisation implique que ces institutions disposent clairement de compétences distinctes de celles de l’État, et possèdent une personnalité juridique leur permettant de mener à bien leurs missions.

Opportunités concrètes pour les territoires gabonais

Avec cette nouvelle Constitution, les collectivités locales du Gabon pourront désormais agir de manière plus directe et efficace sur les problématiques quotidiennes des populations :

  • Infrastructures locales : construction et gestion d’équipements publics adaptés aux besoins précis des communes et départements (routes locales, écoles, dispensaires, etc.).

  • Développement économique local : possibilité d’initier des projets économiques spécifiques adaptés aux ressources et besoins locaux (agriculture, artisanat, écotourisme, PME locales).

  • Environnement et gestion durable : gestion autonome et responsable des ressources naturelles et de l’environnement immédiat (gestion des déchets, assainissement, protection des écosystèmes locaux).

Les défis majeurs à relever pour les futurs élus locaux

Si la décentralisation offre des opportunités indéniables pour accélérer le développement local, elle impose aussi des défis considérables aux futurs élus locaux :

  • Capacité de gestion financière : nécessité de maîtriser les analyses financières, de mobiliser efficacement les ressources locales et de rechercher activement des financements complémentaires.

  • Ressources humaines locales qualifiées : gérer efficacement les équipes locales et assurer une administration performante, transparente et équitable.

  • Partenariats et financement innovant : intégrer les mécanismes de partenariats public-privé (PPP) pour multiplier les opportunités de financement et de réalisation des projets structurants.

Face à ces défis, il est impératif que les futurs élus locaux bénéficient d’un accompagnement spécialisé, notamment en gestion de projet, recherche de financements, mobilisation des ressources locales, gestion prévisionnelle et partenariats public-privé

Recommandation finale : la formation, une nécessité immédiate

En conclusion, la nouvelle Constitution gabonaise du 16 novembre 2024 représente une opportunité historique pour impulser un développement territorial harmonieux et durable dans notre pays. Toutefois, pour que ces opportunités deviennent une réalité concrète et durable, il est essentiel d’engager dès maintenant une stratégie d’accompagnement et de formation solide des futurs élus locaux.

Il revient ainsi aux universités, instituts spécialisés, experts indépendants et partenaires internationaux d’apporter leur expertise afin de garantir le succès de ce processus majeur pour l’avenir économique et social du Gabon.

Article rédigé par Innover et Inspirer.

À propos de l’expert : André BIAYOUMOU

André BIAYOUMOU est un expert gabonais en stratégie financière des collectivités locales, reconnu pour son engagement en faveur d’un développement territorial inclusif et durable. Il est diplômé d’un Master en économie du développement, spécialisé en conception et ingénierie de projets de développement, obtenu à l’Université de Bordeaux, en France.

Après avoir effectué ses études secondaires au Gabon, son pays natal, André BIAYOUMOU s’est engagé dans la valorisation des compétences locales et la structuration des collectivités. Il milite activement pour une meilleure gouvernance des territoires, notamment en milieu rural, convaincu que la relance économique passe par des collectivités autonomes, responsables et dotées de moyens.

À la croisée de l’économie et de la technologie, il fait également partie de l’équipe de développement de NDZILA AI, une intelligence artificielle africaine conçue pour répondre aux besoins spécifiques du continent en matière d’éducation, de gouvernance locale, et d’innovation sociale.

Pour lui, "le véritable progrès ne peut se faire sans l’implication active des territoires. L’autonomie locale, la formation des élus et l’innovation technologique doivent être les piliers de notre développement."

 

Article rédigé par Innover & Inspirer – 2025
Laboratoire d’idées, d’innovation sociale et technologique au service du développement africain.

Chez Innover & Inspirer, nous croyons que la transformation des territoires passe par l’intelligence collective, l’accompagnement des leaders locaux et l’intégration d’outils modernes tels que l’intelligence artificielle. À travers nos analyses, nos projets et nos publications, nous contribuons à bâtir un avenir durable et ambitieux pour l’Afrique.

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